Quel matériel utilisez-vous ? Pour l’instant je travaille avec un Reflex Canon. J’avoue ne pas être fétichiste de l’appareillage à outrance. Pour moi la matériel doit être avant tout fonctionnel et facilement transportable. Je suis bluffé par des amis qui, avec un bon compact, en mode auto et un zoom de base, réalisent de superbes photos. Comme quoi il n’est besoin d’avoir la Rolls des réflex. Cependant un Blad, un Rollei ou une chambre Arca ça me laisse rêveur !
Quels sont vos 2 objectifs préférés ? J’ai un faible pour un 50mm qui me permet d’être opérationnel dans la plupart des cas; grâce à lui je me trouve le plus en phase avec l’environnement; il me permet d’être à la bonne portée du paysage , de la scène, de tout ce qui m’entoure. C’est comme si j’avais un troisième œil. Je l’ai toujours avec moi. C’est discret et plus léger surtout quand je voyage. Le deuxième c’est un grand angle 16/35mm.
Focales fixes ou zoom ? Pourquoi ce choix ? Le gros dilemme ! Quelle optique choisir selon les situations ? Par exemple, lors d’un voyage en Ethiopie j’ai beaucoup utilisé mon grand angle. Au milieu des processions des fêtes de l’Epiphanie, j’étais au cœur des manifestants en délire qui me cernaient de partout. Avec le 16/35mm, je pouvais prendre les protagonistes sans faire le focus sur eux. Je l’ai utilisé également pour faire des photos dans les églises enterrées de Lalibela où je n’avais aucun recul. Pour ce qui concerne mon travail en général, je n’utilise que le 50mm avec ou sans pied. La focale fixe permet de me concentrer uniquement sur la composition.
Comment choisissez-vous vos images lors de l'éditing sur l'ordinateur ? La post production est une part importante du travail. Je me trouve confronté au choix. Je garde avant tout les images dont la structure (et c’est là que je privilégie la composition rythmique) va me parler ou répondre à mon idée. Il faut aussi que l’image m’étonne et surtout m’émeuve. Elle doit répondre à mes exigences formelles mais elle doit également réveiller un autre monde que je n’avais pas perçu à la prise de vue. Autrement dit, l’image devient indépendante de son contexte et révèle à une autre dimension. Autant dire qu’on est éloigné d’une représentation de la réalité...
Quel regard portez-vous sur la photographie en général ? Je m'intéresse énormément à tout ce qui se fait dans le domaine de la photo contemporaine. Revues, expositions, j’essaie de suivre ce qui se passe dans le monde. J’aime beaucoup le travail de certains artistes chinois (Liu Bolin, Li Wei) de coréens (Bae Bien-U, Kim Kyung Soo) et d’africains comme l’éthiopienne Aida Muluneh. Il y a un nombre important de photographes intéressants de par le monde et dans les pays émergents. Je place Liu Bolin vraiment au-dessus car sa démarche sur l’illusion de la réalité, ses recherches esthétiques, et sa maîtrise de la mise en scène sont vraiment très abouties. Il est à la fois dans la performance éphémère et l’acte photographique.
Quel grand maître de la photographie admirez-vous le plus ? Voilà une question bien embarrassante: le singulier oblige à n’en choisir qu’un seul! Je choisirais dans la période de l’entre deux guerres quand la photo a été reconnue comme un art à part entière. Du courant de ces années là, avec Brassaï, Man Ray, etc., je retiens particulièrement André Kertész. C’est lui en 1919, qui est choisi comme photographe dans l’Art Vivant, pour représenter l’art de la Photo. Il a développé un travail très imaginatif et poétique; il a osé beaucoup de choses dont ses anamorphoses «Distorsions». Et si je pouvais emporter une image avec moi sur une île, ce serait celle de son nageur sous l’eau. C’est l’image d’un corps de nageur diffracté par l’eau. On dirait un poisson; le temps semble couler en silence avec un effet de moirage qui donne de la matière et du mystère...
Quel genre photographique vous attire-il ? Quand j’étais petit je rêvais d’être globe-trotter; c’est finalement la danse qui a prévalu! Mais j’ai toujours gardé un faible pour l’aventure et la découverte du monde. La photo me permet d’explorer beaucoup de sujets, dont en priorité le paysage, l’activité humaine et le portrait. Dans ses trois domaines je retrouve mon goût pour le voyage et les rencontres. Et dans ces trois domaines j’ai, comme des leitmotiv, des corpus qui me relient à mes racines, ou tout simplement à mon moi profond: les portraits de vieux, les arbres, les forêts, les marchés, les sites archéologiques font partie de mon jardin secret.
Avez-vous d’autres sources d’inspiration que l’art photographique ? Oui bien sûr! Je me passionne pour la peinture, la littérature, le cinéma. Les écrivains qui explorent la mémoire donc le temps passé et ses ramifications avec le présent. Proust bien sûr, mais aussi Modiano qui usent de subtilités inépuisables pour tirer les ficelles du temps et de la mémoire. Chez les peintres je suis fasciné par Fabienne Verdier qui est dans le mouvement et l’intemporel. Elle maîtrise une technique qui lui permet de faire corps avec ses toiles. Elle est dans la lignée de grands maîtres comme Hartung, Pollock et Soulages.
Avez-vous un accessoire qui vous est particulièrement utile dans votre approche photo ? Mon filtre noir.... Il me permet de capter le murmure du vent...!
Avez-vous un site internet, une page Facebook, ou autre ? J’avais un site pour un projet spécifique: Blue Knot, la Bobine Bleue. J’avais réuni sur ce site une galerie de portraits de personnes de tous âges et de tous pays. Dans des situations différentes, le protocole est identique pour chacun des protagonistes: dénouer le fil d’une bobine, toujours la même, que je transmets de main en main.... Déjà à l’époque, une approche décalée du passage du temps ! Pour l’instant j’ai mis en veille ce projet et j’ai donc momentanément abandonné ce site.